L’avenir de l’Italie et de l’Union Européenne se joue en ce mois de Septembre

Les mouvements souverainistes italiens de Salvini (Ligue) et de Di Maio (M5S) ont été portés au pouvoir avec une double exigence des électeurs : arrêter les flux d’immigration vers l’Italie et relancer enfin la croissance et l’emploi dans la péninsule : l’Italie est en effet malade de l’euro et n’a quasiment eu aucune croissance depuis 17 ans, depuis l’adoption de la monnaie unique. Chacun imaginera aisément les dégâts sur l’emploi et notamment l’emploi des jeunes, la pauvreté, la santé des entreprises italiennes.

Voici l’évolution du PIB c’est-à-dire la richesse italienne depuis 2001.

 

Premier temps : la bataille de l’immigration :

Salvini a engagé la bataille de l’immigration à travers un bras de fer médiatique avec les autres pays, avec l’Union Européenne et avec la bien-pensance. Il l’a gagné haut la main. Il a arrêté une partie des bateaux de migrants et en a laissé passer quelques autres. Il a dénoncé l’hypocrisie des bien-pensants, la logique des passeurs et des associations qui finalement les servent. Le peuple italien a été séduit par un homme politique qui tient enfin ses promesses et qui revendique « L’Italie d’abord ». Cela est pour l’instant mérité. Les sondages donnent maintenant la Ligue à 32% en cas de nouvelles élections.

Deuxième temps : la bataille de l’économie, du chômage et de la pauvreté.

Le débat et le vote du budget vont bientôt commencer. L’Italie est économiquement très affaiblie, les souffrances sociales du peuple italien sont à la fois endémiques et considérables avec des taux de chômage des jeunes au-dessus de 30% depuis des années. A tel point que les jeunes italiens n’ont souvent pas d’autres choix que l’exil. Pour ceux qui ont un emploi, les salaires sont en baisse de 5% depuis 2004. Là repose la deuxième partie des promesses des partis du gouvernement, Ligue et M5S, c’est leur deuxième défi. Ne voulant pour l’instant pas sortir de l’Union Européenne et faire du patriotisme économique, du protectionnisme intelligent et toutes les mesures rendues possibles par le retour de la souveraineté, il ne reste plus qu’un levier important pour relancer la croissance : le budget qui va être débattu et voté dans les semaines à venir. La question est fondamentale : le gouvernement va-t-il relancer la croissance avec un budget offensif à base de travaux sur des infrastructures vétustes, de baisses d’impôts promises par Salvini et de revenu universel par Di Maïo ? Ou bien va-t-il céder à l’Union Européenne, abandonner les promesses faites aux électeurs en appliquant l’austérité européenne ?

L’abandon des promesses sur l’économie ?

S’ils abandonnent leurs promesses, l’économie italienne déjà presque à l’arrêt (0.5% de croissance en 6 mois) va s’enfoncer d’avantage encore. En effet, les taux italiens à 10 ans ont augmenté, passant de 1.8% à près de 3%. Cela est un frein important qui sera encore plus puissant quand la BCE arrêtera d’acheter des dettes publiques dans 4 mois. Si l’on rajoute à cela, un programme d’austérité, l’Italie pourrait s’enfoncer dans la récession, provoquant plus de difficultés économiques, de chômage et de pauvreté. Le gouvernement serait déclaré comptable de la situation et logiquement mal jugé par les Italiens dans un an. C’est la voie de la « Tsiprassisation » du nom du président grec qui a laissé ruiner son pays contre le vote de ses citoyens avec l’aide de la Troïka européenne.

L’abandon des promesses sur l’immigration ?

L’autre moitié des promesses, sur l’immigration, ne pourra pas non plus être tenue sur le moyen terme. Le renvoi de 500.000 immigrants illégaux est rendu impossible par les lois italiennes qui transposent les directives européennes sur le sujet. En effet, la Directive retour impose qu’un clandestin ne peut être renvoyé dans son pays que s’il est volontaire ! S’il refuse et disparaît dans la nature, on peut alors essayer de le rattraper, avec une chance infime, pour le faire partir. Encore faut-il que les pays d’origine l’acceptent. Or, la majorité de ces pays y font obstacle et le refusent. Seul, l’utilisation de toutes les armes économiques et diplomatiques d’un pays entièrement souverain imposera aux pays d’origine de récupérer leurs clandestins, une mesure pourtant naturelle et légitime (menaces de coupe dans l’aide au développement, de restriction des flux d’argent entre les 2 pays, de restriction sur les échanges commerciaux…).

L’immigration illégale continue à arriver en Italie en provenance des Balkans via les frontières poreuses de l’Union Européenne. L’immigration légale arrive encore, aidée par les contraintes européennes comme l’obligation d’accepter le regroupement familial.

S’il n’est pas en pleine possession de ses lois, de ses frontières et de ses armes économiques, ce gouvernement souverainiste sera dans le temps immanquablement en échec sur l’immigration. Si ce gouvernement est encore là dans un an, il sera alors logiquement tenu comptable de la situation sur l’immigration par son peuple. Le bras de fer médiatique ne suffira plus aux Italiens.

Continuer ainsi, rester dans l’Union Européenne et donc dans l’impuissance en termes d’action tuera la foi dans les souverainistes italiens. C’est un piège mortel pour eux comme pour tous.

Quel choix reste-t-il au gouvernement italien ?

Le seul choix qui reste au gouvernement italien est donc de faire un véritable bras de fer avec l’Union Européenne sur le budget : engager un véritable programme de relance de l’économie pour soigner le chômage, la pauvreté et la mauvaise santé économique générale. Le refus de Bruxelles, sous prétexte habituel d’austérité, démontrera à tout le peuple italien qu’il n’y a aucun remède à la souffrance économique et sociale dans l’Union Européenne. Le gouvernement italien pourra aussi démontrer à sa population qu’il n’y a aucun remède aux flux d’immigration en étant dans l’Union Européenne. Ceci est assez simple pour des partis au pouvoir. Ces actions donneront aux Italiens foi et confiance dans ce gouvernement et les partis politiques sous-jacents, ce qui sera un excellent point pour eux lors de nouvelles élections.

Si Salvini a annoncé hier qu’il comptait globalement respecter les contraintes de Bruxelles sur le budget, il faut attendre pour juger : parlait-il de déficit primaire ou global, de déficit avant investissements publics, sur quelle hypothèse de croissance comptait-il, 1% ou 4% ? Nous sommes dans une période tactique pour le gouvernement italien et personne n’est sûr de ce qui sortira finalement du chapeau. Cependant, ce gouvernement n’aura pas le choix, il agira en héros ou en traître du peuple italien. Je penche pour la première proposition.

De nouvelles élections pour récupérer les moyens d’agir de l’Italie, de guérir les plaies ouvertes.

Une démission de la Ligue de Salvini, la partie la plus ferme du gouvernement, suite au refus de toutes solutions par Bruxelles, suffirait à provoquer de nouvelles élections. Le seul gouvernement alternatif possible serait en effet un gouvernement M5S, Parti Démocrate accompagnés des petits partis et incluant même Forza Italia, le parti de Berlusconi, pour parer aux nombreuses défections de députés M5S. Cela paraît arithmétiquement possible mais est dans les faits politiquement impossible car le M5S ne l’acceptera jamais, la lutte anti-corruption étant un des piliers de ce parti (Voir la composition de la chambre des députés et du Sénat en fin d’article).

Ces élections se feront alors sans trompe-l’œil, sur le thème de la nécessité pour l’Italie de sortir de l’Union Européenne pour réduire ses problèmes d’immigration et ses problèmes économiques et sociaux. Vu les sondages actuels de 32% pour la Ligue et de 28% pour le M5S, il y a peu de doutes quant à la victoire des souverainistes de droite et de gauche. Même si l’Union Européenne utilise l’arme des marchés financiers pour peser le plus possible sur l’élection (Le Commissaire Européen Oettinger expliquait le 29 Mai 2018 « Les Marchés vont apprendre les Italiens à voter ».). L’enfumage financier ne prendra pas, la Ligue ayant prévenu les électeurs sur les « partis du Spread ». Les élections ont de grandes chances d’être gagnées.

La formation d’un gouvernement d’Italexit sera alors une formalité. L’Italie serait le premier membre fondateur de l’Union Européenne à en sortir, quelques temps après le Royaume-Uni. La désintégration de l’Union Européenne est en marche : il ne faut plus qu’un peu de courage des dirigeants souverainistes pour l’acter. Relever nos pays à genoux est à ce prix, un prix faible pour la liberté, l’unité et la prospérité.

 

630 membres de la Chambre des députés et les 315 membres du Sénat.

Chambre des Députés 630 Députés Sénat 315 Sénateurs
Majorité nécessaire 315 Députés Majorité nécessaire 158 Sénateurs
M5S 228 M5S 112
Ligue 125 Ligue 58
Frères d’Italie (proches de la Ligue) 32 Frères d’Italie (proches de la Ligue) 18
Parti Démocrate et assimilés 121 Parti Démocrate et assimilés 60
Forza Italia (Berlusconi) 104 Forza Italia (Berlusconi) 57
Libre et égaux (gauche progressiste) 14 Libre et égaux (gauche progressiste) 4
Nous avec l’Italie (démocrate-chrétien) 4 Nous avec l’Italie (démocrate-chrétien) 4
Autres 2 Autres 2

 

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